Lendemain de cuite ou bien...

C'était avec un mal de crane absolument abominable que Sasha s'était réveillée, la joue contre l'asphalte fraîche et la tête qui lui donnait l'impression d'être habitée par une dizaine de marteau furieux. Sa première réflexion fut de se dire qu'elle un lendemain de cuite vraiment méchant, enfin, cette impression fut vite balayer par un brouhaha plus important que les imbéciles avec qui elle se réveillait en tant normal. Dans un mouvement plutôt lent, les yeux toujours clos par crainte de la lumière éblouissante du jour, elle s'était redressé en articulant faiblement un faible " Damare " à ceux qui faisait du bruit. Elle avait tellement mal à la tête qu'elle aurait sans hésitation tordu le cou de la première personne à portée de main. Bien évidemment, sa voix c'était complètement perdu dans l'ambiance lourde et paniquée des participants dont elle faisait partie sans vraiment le savoir encore. Assise sur le béton, elle se décida à ouvrir les yeux observant d'un air plutôt sérieux cet endroit inconnu. Une chose était sûre, elle n'était pas où elle était sensé se trouver…

Après ce réveil douloureux, au milieu de toute ces personnes paniquée ou tout du moins bruyante, elle regarda un peu partout autour d'elle. Elle n'était sûrement pas à Tokyo… Comment avait-elle pu atterrir ici ? Visiblement, elle n'était pas la seule à se poser la question même si elle l'entendais à droite et à gauche en différente langue. Une chance pour elle, qu'elle en connaisse certaine et surtout qu'elle connaisse l'anglais, langue plus ou moins universelle. Enfin, elle parlait couramment l'américain, ce qui est en grand majorité similaire à l'anglais, la cachet "So britsh" en moins… S'aidant d'un élément quelconque du décors, sûrement une personne d'ailleurs bien qu'elle n'est pas porter d'attention à ce détail, elle se mit debout, dégageant son visage de quelques mèches d'un geste rapide de la tête qui lui donna rapidement le vertige. Dans un mouvement reflex, elle porta la main derrière sa tête et découvrit par la même, l'origine de son affreuse migraine. Ce n'était pas du tout à cause de l'alcool mais à cause d'un vilain coup qui lui avait été porté à l'arrière du crane semblait-il.

Se déplaçant de son pas altier au milieu de ces étrangers paumés et apeuré, elle rejoignis un mur pour s'y appuyer. Pas vraiment fatiguée, vu la sieste forcée qu'on venait de lui offrir, mais elle avait besoin de se poser quelques instant pour tout remettre dans le bon ordre. Elle était sortie, comme tout les soirs, pour rejoindre tout son petit monde… Elle avait recalé deux trois racailles qui avaient une trop grande bouche à son goût… Ensuite, elle été aller se poser tranquillement dans l'immeuble desert qu'ils avaient investit et ensuite…

- K'so…

C'était le trou noir. Sûrement les choses reviendraient par la suite, une fois que ce bruit et cette douleur lancinante seraient partis. Même si elle refusait de se l'avouer (immaginez à autrui… mais passons), elle se faisait un peu de soucis de pour ces "camarades". Elle jeta un rapidement coup d'œil. Des vieux, des trop jeunes… aucuns voyous mais il était évident qu'elle ne voyait pas tout de l'endroit où elle se trouvait.
Dans sa langue natale, autrement l'anglais typique d'un bon militaire américain, elle marmonna quelques paroles pour elle même.

- C'est quoi ce bordel… J'me barre dès que j'peux moi.

Elle glissa la main dans sa poche, rassurée d'y trouver ses lunettes et elle vérifia ce qu'on avait bien dénier lui laisser : une montre, ses lunettes et un vieux crayon à papier. Et bien, tout ça lui appartenait mais évidemment, elle n'avait plus ni son beeper ni son porte-feuille et encore moins son portable. Elle soupira de lassitude et passa machinalement sa main dans sa nuque pour la masser légèrement en fermant les yeux.

*- Quel boucan… Ils peuvent pas la fermer. Comme si ça allait faire avancer les choses de geindre. -*

~~Christopher savait compter deux par deux et lassé ses chaussures...~~

[ ~ Okay, okay un peu de sérieux mes amiiiis ~ ♥; ]

... Un léger courant d'air. Non, non... Ce n'était que la complainte des murs qui donnait cette impression. Alors, comme ça, il n'était plus en Angleterre ? L'avait-il jamais été... Il ne savait même plus. Ce n'était qu'un enfant après tout, l'Angleterre aussi bien que l'Allemagne il ne pourrait pas les situer une carte, quand bien même il aurait été doté de la vue... Triste vie d'un gamin qui veut absolument devenir grand... Passons, que venait-il de faire ? Rien... Dormait-il ? Non, ses paupières s'agitaient frénétiquement tandis que ses doigts gigotaient à la recherche de repères ou n'importe quoi qui pourrait ressembler à ça... Mais il n'y avait rien qui aurait pu l'aider. Il poussa sur ses bras frêles et se retrouva en position assise. Ses mains cherchaient encore. Il s'agitait. Ses grands yeux émeraude s'ouvrirent, ils brillaient étrangement. Ses mains, encore, encore et encore s'agitaient... C'était froid. Du carrelage ? Non... C'était...

« Autre chose... Violine ! »

Il se redressa en titubant. Il ne voyait pas où était son violon. Il parcourut avec habileté la surface "granuleuse" de ce qu'il appellera le "Vide". On lui avait volé... C'est ça ! Non ! Non, quelqu'un l'avait pris mais lorsqu'il le verrait il le lui redonnerait... Oui, parfaitement ! Voilà... Rien à craindre... Rien. Tout était beaucoup trop bruyant ici. Il ne voyait rien à part du flou, des ombres, des silhouettes... Du vide quoi. Il se dressa lentement et se dirigea vers ce qui lui semblait ressembler à un mur. Un grand mur ? Gris... Oui gris. Il était gris comme... comme l'étui de son violon. Son violon ! Mais bordel, où était passé cette saloperie d'instrument ? Où... Il devait rester calme, calme... Il respira profondément, il allait trébucher dessus dans quelques...

« Hum... Qu'est-ce que c'est que c'truc ? »

C'était gris... Enfin "apparemment"... C'était son violon ? Fausse joie non... Non, c'était bel et bien l'étui de son violon adoré. Il se baissa et le ramassa presque comme si quelqu'un s'apprêter à le lui voler. Voler... Joli mot... Qui aurait l'idée de lui voler un violon ? Techniquement ça n'aurait pas servi à grand-chose de le faire... Pour lui.

D'accord, tout aller bien, un violon, cinq membres, seulement trois sens... Odorat, toucher et goût... La vue lui faisait défaut. Et cela allait être très difficile d'avancer dans ce "Vide" bondée de silhouette en mouvement. Et ça geignait et ça geignait... C'est chiant. C'est chiant parce qu'ils ne servent à rien ceux qui geignent... A rien. Ah si, à l'énerver. Beaucoup...

Quelques pas de plus et il s'approcha de ce qui lui avait semblé ressembler à un mur. Il utilisa tous ces sens pour se permettre d'analyser la situation. Ils étaient beaucoup, enfermer dans un "Vide" à quatre coins... Gauche, droite, mais rien ne lui permettaient de se situer. Il était au milieu ? Parallèle à tel ou tel individu ? Il ne distinguait rien... Le brouhaha incessant rendait l'atmosphère irrespirable. Et puis ce genre d'atmosphère oppressant, le gamin détestait ça... Ses membres ankylosés semblait pesait trois tonnes. Trois tonnes et c'était chiant. C'était chiant parce qu'en plus il devait porter son violon. Mais pour son violon il était prêt à décrocher les étoiles le p'tit Christopher. Poétique...

Le gamin longea le mur pendant quelque minute. Il lui semblait traverser le résultat d'un lançage de bombe. Des plaintes, des gémissements et tout ce qui s'ensuit. Le plus exaspérant c'est que personne ne semblait se soucier de comment ils pouvaient sortir d'ici. Chris ne savait pas s'il devait pleurer pour s'attirer les faveurs de quelqu'un ou rester assis à se tourner les pouces. Bref sourire, il n'était pas du tout du genre à se tourner les pouces, encore moins dans cette situation. Il soupira et baissa la tête. Il commençait à regretter... Non, il ne pouvait pas regretter cette bourgade, cette bonne vieille ville de Londres. Il ne la regrettait pas. Il ne voulait plus jamais y retourner. Ni même rencontrer une personne qui lui parle en anglais, en américain en tout ce qui avait un semblant de tout ça...

- C'est quoi ce bordel... J'me barre dès que j'peux moi.

Il releva la tête. C'était une once de sourire qui se dessinait sur ses petites lèvres roses ? Oui... Parce que c'était de l'anglais ? Du charabia qui ressemblait parfaitement à de l'anglais ? De l'anglais... C'était marrant. Il faisait tout le contraire de ce qu'il aurait voulu. Il s'approcha de cette voix, semblant sortir d'une jeune femme. Aller, donnons lui 20 ans, il n'était pas habitué aux gens plus jeunes que lui. Il doutait qu'elle aller prendre pitié de lui. Mais l'anglais, c'était un peu sa langue de "jeunesse". Même s'il était Allemand de naissance... Il tenta de lui répondre, de sa petite voix pareille à un gamin de son âge il lança :

« Vous savez à quoi ressemble cet endroit ? »

Ses yeux émeraudes fixer le vide. Il ne regardait pas la jeune fille, il regardait juste dans sa direction. Il ne voyait qu'une silhouette floue. Et puis rien... Il venait presque de lui dire qu'il était aveugle. Il aurait pu juste lui demander son prénom... Comme les gamins le font souvent. Mais ce n'était pas un gamin comme les autres. Donc il n'avait pas à le lui demander, pas encore... Il marqua un temps de retrait. Finalement il aurait voulu ne pas lui avoir adressé la parole. Il n'avait rien à lui dire. Et savoir où pouvait-il être n'était pas la chose la plus importante à savoir aussi...

Ses lunettes sur le museau, la tête appuyé contre le mur, plus que son dos d’ailleurs, Sasha se laissait reposer contre la surface fraiche qui faisait un peu de bien à la bosse qui se trouvait à l’arrière de son crane. A croire que ceux qui l’avaient emmené n’étaient pas vraiment disposés à lui demander bien gentiment de les suivre. En tout cas, ils ne faisaient pas le moindre doute qu’ils avaient dû s’y mettre à plusieurs s’ils l’avaient embarqué de force comme il le semblait.

*- Pourvu que cette bande d’imbéciles n’ait pas trop jouer les casse cous. -*

Il était évident qu’elle ne s’inquiétait pas vraiment pour ses ravisseurs, mais plutôt sur ceux qui auraient pu les empêcher de repartir avec leur « petite leader préférée ». Dieu qu’elle détestait ce surnom débile. Elle préférait presque qu’il l’appelle « Madame » quitte à choisir.

Alors qu’elle grognait contre ce fichu souvenir de surnom stupide, une voix fluet et enfantine retentit assez près d’elle pour que ça puisse lui être adressé. Elle soupira, ne prenant même pas la peine de baiser le regard sur le petit garçon qui venait de l’interroger. Elle avait en horreur les enfants, quelques soit leur âge. Elle les avait toujours considéré de la même manière qu’un officier supérieur considère un bizut : moins que rien. La plupart des gosses ne savaient que se plaindre, appeler leurs mère, pleurer, promettre que quelqu’un d’autre viendra te casser la figure et aussi répéter de manière stupide tout ce que peuvent leur dire leur parent.

C’est surement pour ça qu’elle répondit, dans la langue dans laquelle il lui avait parlé, par reflex, d’un ton plutôt sec et froid. Elle n’allait pas se montrer maternelle, elle ne le faisait même pas avec ses gars, alors avec un mioche inconnu... Surement pas.

- Mais bien sur voyons... à un parc d'attraction, ça ne se voit pas ?

Sarcastique au possible comme réponse, il faut bien l’avouer. Après cette remarque non dépourvue d’ironie mauvaise, elle se redressa et baissa les yeux à travers ses lunettes vers la petite tête blonde qui venait de recevoir la réplique cinglante. Même à travers ces lunettes noires, elle pouvait voir que l’enfant était au minimum malvoyant ou carrément non-voyant. N’allez pas vous imaginez qu’elle se mit à éprouver des remords pour sa réponse, ce n’était vraiment pas son genre. Mais elle consentit néanmoins à répondre.

- Un vieil entrepôt remplit d’un paquet d’imbéciles, de vieux et de mioche dans ton genre. Mais ça, même un aveugle aurait pu le savoir avec la résonance qu’il y a.

On a beau dire, avoir reçu une éducation d’un militaire avait de nombreux avantages. L’un d’entre eux était qu’elle avait appris à se servir pleinement de tous ses sens. Rien qui dépasse la limite humaine bien évidement, mais tout le monde à certains sen plus affutés que d’autre. Pour Sasha, son top 3 était l’ouïe, l’odorat et la vue. D’ailleurs, une très légère odeur d’iode avait réussi à lui parvenir. Rien de très prononcé mais elle savait au moins qu’ils étaient à quelques kilomètres de la mer. Mais elle n’allait pas s’amuser à tout expliquer à un mioche. En plus, à quoi ça pourrait bien lui servir, il ne devait même pas savoir barboter dans une baignoire.

Elle se ré appuya contre le mur et baissa un rien ses lunettes pour regarder l’enfant pardessus celui-ci de son regard d’azur. Il semblait plutôt chétif, complètement inutile et il portait cet étui encombrant. Au vue de la taille c’était surement un violon mais ca pouvais être tout autre chose. Tout le monde connaît la cachette préféré pour une arm à feu si on veut être discret. Mais, visiblement, l’enfant n’aurait même pas pu assurer le recul d’une arme si tant est qu’il avait pu viser ce qui n’était vraisemblablement pas le cas au vue de son handicap si toute fois celui-ci n’était pas feint.
Elle continua de l’observer en silence. Commencer joyeusement une conversation poussée entre anglophone n’était pas dans ses intentions d’ailleurs, elle pouvait converser avec près de la moitié des personnes présentes dans cet entrepôt si elle le voulait.

Il faisait froid... Ou c'était juste une impression que le gamin se donner pour le fun. Il n'avait pas vraiment froid, mais quelque chose faisait trembler ses doigts et rendait ses joues, d'habitude d'une couleur pâle, roses.

- Mais bien sur voyons... à un parc d'attraction, ça ne se voit pas ?

Il releva la tête. Et il sourit, enfin ce n'était pas vraiment un "sourire", juste une ébauche. Ce n'était pas la remarque en soi qui l'avait fait sourire, c'était la façon dont elle l'avait dis. Au moins, elle était assez intelligente pour ne pas se laisser berner par un gamin. Donc, il n'avait pas de quoi sourire finalement... S'il ne pouvait pas l'amadouer en jouant au gamin aveugle et perdu, il devait alors user de la seule chose qui lui rester... Il saurait s'il aurait à s'en servir.

- Un vieil entrepôt remplit d'un paquet d'imbéciles, de vieux et de mioche dans ton genre. Mais ça, même un aveugle aurait pu le savoir avec la résonance qu'il y a.

Il perdu alors son sourire angélique. Des "imbéciles" ? Pas besoin d'aller en chercher dans un entrepôt pour les trouver. Cette fois son visage s'illumina d'une petite lueur malicieuse et il lui lança, cette fois d'une voix beaucoup plus adulte portant sur des notes sarcastiques :

« Qui vous dit que je suis un mioche aveugle ? »

Il se lécha les lèvres. Le soi-disant "froid" qu'il s'inventait dessécher réellement celles-ci. Les rares lueurs qui pénétraient à l'intérieur de l'entrepôt jouaient sur ses cheveux blancs. Serrant son violon, plus précisément son alto, il poussa un bref soupir quand celui-ci lui pesa. Il marmonna dans un allemand un peu maladroit :

« Si toutefois on n'avait des yeux pour s'en servir convenablement... »

Ce n'était pas parce qu'il ne voulait pas qu'elle l'entende. Juste pour lui-même. Il se parlait souvent à lui-même et il aimait. Oui, il se rappelait de ses après-midi ensoleillés où il s'allongait sur la terrasse de son jardin et où il se parlait à lui-même. Il se parlait là encore en allemand. Mais c'était surtout pour ne pas que sa soeur le surprenne à dire du mal d'elle. Il ne l'avait jamais aimé cette soeur et c'était réciproque, il le savait...

Bref moment de silence où il fit rouler ses yeux émeraudes en quêtes de couleur. Le gris il n'aimait pas ça... Il trouvait cela trop monotone, presque gerbant. Depuis qu'il avait perdu la vue il ne voyait que ça. Du gris et encore du gris. Il reporta son attention sur la silhouette qui semblait avoir une vingtaine d'année. Il n'aurait sû lui en donner plus. Elle semblait peut-être petite ? Ou trop grande ? Qu'importe, il ne se mêlait pas de ce qui ne lui regardait pas... Enfin, pas aujourd'hui... Son souffle se transforma en saccade irréguliers. Il n'était pas claustrophobe, mais le fait de se retrouver enfermer dans une pièce à quatre coins étroits avec tous ces gens le rendait mal-à-l'aise.

« Vous n'aimez pas les enfants n'est-ce pas ? »

Ses lèvres s'étaient tordues en une moue mêlant ironie et malice. Ses grands yeux brillaient d'une lueur enfantine. Sa voix était redevenue celle d'un enfant. Celle dont on s'attendait d'entendre sortir de la bouche pleine de questions d'un enfant de son âge. Des questions, il aimait bien les poser. Pas y répondre. Un moyen d'auto-défense souvent exaspérant. Mais un moyen de défense quand même. Il aimait bien en poser, aussi, parce qu'il aimait exaspérer les gens avec. C'était amusant de les voir se tortillaient en se retenant de ne pas lui crier dessus. Il s'attendait presque toujours à recevoir une gifle, mais les gens se retenaient. Et ça l'exaspérait... Il était peut-être un poil trop sadique pour son âge... C'était amusant.

« Elles sont jolies vos lunettes... Moi aussi j'en avais des comme ça... Oui celles avec de gros verres. Mais je les aie cassées... »

En fait, l'histoire était là... Il les avaient cassées en les serrant autour du cou de sa soeur. Cette pensée lui fit décrocher un sourire enfantin... C'était une remarque pleine d'humour en plus... Il ne les voyaient pas ses lunettes. Il ne pouvait même pas dire si elles avaient de gros verres ou pas. Il avait envie de lui poser mille et une question... Oui parce qu'il avait envie qu'il la frappe. Et on ne frappe pas un enfant sans raison... Rien ne trahissait cette pensée... Sauf peut-être cette lueur à peine sadique dans ses yeux émeraudes... Elle n'allait sans doute se douter de rien. Elle n'était pas assez... Bête.

L’enfant semblait s’accrocher. Il ne bougeait pas. C’était agaçant. D’habitude, devant cette attitude frigide et un rien menaçante, les mioches s’éloignaient rapidement. Les mioches ordinaires. Mais plus les minutes défilaient, plus elle doutait du caractère ordinaire de cette demi portion. Il avait une attitude étrange. Enfin, elle n’avait jamais su comprendre les enfants, même lorsqu’elle l’était, alors il était étrange de qualifié « d’étrange » un enfant dans ces conditions car selon Sasha, cela donnait un pléonasme flagrant.

- Qui vous dit que je suis un mioche aveugle ?

Elle haussa un sourcil. Pour la première chose, elle pouvait difficilement en douter vu qu’elle n’était pas la seconde. Mais pour ce dernier détail, il est vrai qu’il pouvait aussi feindre. Mais en même temps, elle n’avait jamais dit qu’il était aveugle. Elle s’était contentée de constatée que même une personne non-voyante aurait pu arriver aux constatations auxquelles elle était arrivée elle-même. Un brin plus intelligent que la moyenne, mais ca restait un sale mioche un peu trop arrogant à son goût. Elle détacha ses yeux de sa personne répliquant simplement pour elle-même.

- Mais qui a dit que tu l’étais ?

Elle n’avait pas attendue de réponse, qu’il y en ait eu une ou pas, elle n’y prêta pas vraiment attention. Ce fut d’avantage la phrase en allemand qui attira son attention. Elle baragouinait l’allemand plus qu’elle ne le parlait. Il n’était pas assez parler pour avoir retenue son attention. Elle ne saisit que l’essentiel de la phrase du jeune homme et bien loin d’elle d’en comprendre le sens. Mais elle l’avait plus entendu qu’écouter et la comprendre ne l’intéressait pas vraiment, voir pas du tout.

Il s’accrochait, il restait là, à la « regarder ». Il était agaçant, par le simple fait qu’il respirait. C’était dur mais elle n’avait comme objectif immédiat de lui faire cesser cette activée vitale alors au fond, elle pouvait bien penser ce qu’elle voulait. Et puis même si elle avait voulu le tuer à cet instant, elle n’avait pas vraiment l’impression que ce sera un mal. Toujours est-il qu’elle s’efforça dans la mesure du possible de l’ignorer. Il respirait fortement. Il n’était même pas capable d’être silencieux. Peut-être malade ? Au mieux, claustrophobe...

*- S’il nous fait un malaise, je le laisse ici... Doit bien y avoir une mère en manque de don d’amour maternelle dans le coin. -*

Il fit la première remarque intelligente depuis le début de son « presque-monologue ». Mais bon, n’importe qui s’en serrait rendu compte. Il paraitrait que les jeunes filles de son âge adoraient papouiller les enfants. Elle avait toujours eu tendance à être en marge, et ce trait n’était pas en reste. C’était même à l’antipode d’une attitude normale d’une jeune fille. Il fallait bien se rendre à l’évidence. Elle n’avait pas le moindre sentiment maternel et elle s’en portait d’autant mieux ainsi.
Elle laissa filer un léger rire, plutôt clair et cristallin, mais complètement et sans la moindre équivoque, moqueur voir mauvais. Elle se détacha du mur en donnant une légère poussée avec ses mains et se mis à applaudir doucement.

- C’est bien ! Tu es sûr que personne ne te l’a soufflé parce que sinon... Wow, je suis impressionnée.

Avec son petit étui de riche pupille de la nation, ces airs ingénus et son petit ton enfantin presque trop caricatural, il l’agaçait. Elle finit par croiser les bras en toisant Christopher.
Le voilà qui lui parlait de ses lunettes. D’ailleurs, après sa remarque, elle redressa celles-ci sur le sommet de sa tête, emportant au passage quelques mèches. Cette façon de passer du coq à l’âne. Agaçante. Cette manière de la regarder sans qu’elle ait vraiment l’impression qu’il la regarde. Agaçante. Ce petit air malicieux. Agaçant. Cette lueur difficile à cerner au fond de ses pupilles. Agaçante.

Il l’agaçait...

Elle le regarda, laissant couler quelques secondes après sa remarque sur les lunettes. Sans dire le moindre mot, ni faire le moindre geste. Elle restait là, à le toiser. Elle cherchait. Quoi ? N’importe quoi.
Elle finit par sortir de ce petit silence qui n’avait duré qu’une dizaine de secondes.

- Ecoute moi très attentivement, et n’en perds pas une miette. Je me moque de tes lunettes, de ta vue ou de quoique se soit te concernant. Je ne ferais pas semblant d’être sympathique avec toi parce que tu es un gosse. On est tous dans la même merde et tu sais quoi, tout le monde s’en cogne d’un mioche inutile dans ce genre de situation. Parce que les mômes, c’est inutile.

Elle avait articulé chaque mot, chaque syllabe avec la précision d’un couperet. Une froideur égale à celle de l’Arctique, un ton tranchant comme une lame de rasoir, mais pas un mot qui ne dépassa son prédécesseur.
Sasha avait été assez intelligente pour ne pas sous-estimée un enfant. Après tout, c’est ce genre de comportement qui lui avait permis un vaste champ d’action, être sous-estimée. Elle ne ferait pas cette erreur, même si ce qu’elle avait devant elle était un enfant.

Il l'aimait de plus en plus... Non, en fait non, il la détestait. Mais quelque chose y faisait qu'il se sentait presque "attiré" par cette fille qui ne lui portait aucune affection. Marrant...

- Ecoute moi très attentivement, et n'en perds pas une miette. Je me moque de tes lunettes, de ta vue ou de quoique se soit te concernant. Je ne ferais pas semblant d'être sympathique avec toi parce que tu es un gosse. On est tous dans la même merde et tu sais quoi, tout le monde s'en cogne d'un mioche inutile dans ce genre de situation. Parce que les mômes, c'est inutile.

* Tu l'as énervé... Elle attaque. C'est ce que tu veux ? *

Un léger sourire éclaira son joli minois. Pas un sourire avec une seule once de gentillesse, non, c'était un sourire qui se transformer en un rictus devenu presque effrayant quand elle finit sa phrase. Il allait pouvoir commencer à jouer. Pas la réduire au silence, il ne la frapperait pas. Lui.

Il effaça aussi vite qu'il était venu ce sourire qui aurait pu le trahir. Mais il savait qu'elle se doutait de quelque chose. Il n'était pas assez bête pour lever le voile sur son vrai caractère, mais pas assez non plus pour continuer à jouer la comédie. Il se contenta de caler sa respiration sur le balancement de la sangle de son violon. Il resta un moment interdit. Il fallait qu'il trouve une question... N'importe quoi, quitte à se faire passer pour un débile...

« Le vent qui frappe ce mur... Il est inutile aussi. Il ne tombera pas hein ? Le mur ? Donc vous vous en fouter... Vous êtes marrante... »

Oui, elle était marrante. Et si elle s'en allait il allait la suivre. Jusqu'à ce qu'il en ait marre de jouer. Il allait trouver un autre jouet. Peut-être plus intéressant, ou peut-être moins... Plus ou moins ? Plus ce sera de la rigolade... Mais moins ? Ce sera beaucoup moins drôle, il en conviendrait... Alors il fallait la retenir. Jusqu'à ce qu'il soit rassasier. Elle le toisait. Il le savait et cela l'amusait... Beaucoup, mais il n'avait pas fini de jouer.

Il reprit son souffle, s'humecta les lèvres et accrocha la sangle de son violon sur son épaule frêle. Sourire presque crispé. Il se retenait de ne pas rire. Il ne se moquait pas d'elle, il se moquait de la situation. Qui aurait pu croire qu'il se retrouverait nez-à-nez avec ce genre de personne ? Elle le croyait inutile, il n'en pensait pas moins. Mais à ses yeux, elle ne valait pas mieux que lui. Cercle vicieux qui l'empêchait de la quitter des yeux. Ses yeux... Il les ouvrit en grand, il ne voulait pas perdre une miette de ses dires. Même si beaucoup d'imbécile s'entasser dans un coin en gémissant. Ils avaient peur, lui s'amusait...

* Dis moi mon petit, tu voulais t'amuser ? Pourquoi tu ne rigoles pas... ? *

Il s'affaissa sur lui-même. Presque comme s'il n'avait pas dormi depuis des jours ses yeux lui brûlaient. Il fit un pas en arrière et lâcha son violon qui s'écrasa sur le sol en un bruit étouffé grâce à l'étui qui ralenti la chute.

* Tu ne te sens pas bien ? *

Le gamin secoua la tête. Il n'allait pas bien non... Il parlait tout seul. Une migraine se mit à lui causer bien des soucis, il peina à se retenir de crier. Mordit ses lèvres...

* Mords-les, tu n'en aura plus besoin... *

Il émit un sifflement rauque et se mit à gueuler :

« Merde ! La ferme ! Ta gueule je ne veux plus t'entendre ! »

Petage de câble qui en surpris plus d'un... Non, en fait personne ne s'était tourné vers lui. Le gamin devenait fou et la simple lueur dans ses yeux le montraient. Il n'allait pas laisser échapper sa seule chance de s'amuser. Il leva des yeux brûlant vers la jeune fille. Il repris cette expression enfantine, mais ses yeux en disaient long sur ses intentions... Elle n'était qu'un jouet pour lui de toute façon...

Ce gosse, plus elle prenait son temps pour le recaler et plus il semblait s’amuser. Cet air sur ce visage si jeune, elle avait l’impression de l’avoir déjà vu. N’allez pas vous imaginez un parallèle entre les deux individus, il n’y en avait aucun. En tout cas, ce mioche cherchait quelque chose, il attendait quelque chose de la part de Sasha et ça, elle en devenait de plus en plus consciente à chaque seconde. Soudain, elle se souvient de cette impression. Ce sourire, cette expression presque malsaine d’un rictus sur le visage d’un enfant. Cela la ramenait bien loin en arrière. Un jeune voisin, peut-être âgé alors d’un ou deux ans de plus qu’elle, s’amusait à torturé de petit animaux. Il avait cette expression, celle d’une personne qui joue avec un être vivant comme avec un jouet.

Il était un rien trop précipité pour sauter à la conclusion mais cet enfant avait quelque chose dans le regard ou même son attitude, de dérangeant. Elle ne l’aimait pas, mais en même temps, il était plus intéressant que les enfants niaiseux. Une sorte de paradoxe. Elle était assez curieuse pour ne pas lui dire de déguerpir sur le champ ou même de s’éloigner d’elle-même, mais elle restait assez allergique aux mômes pour ne pas pouvoir se montrer un temps soit peu... sympathique envers lui. Il continua de parler, pour ce qu’elle écoutait, il aurait même pu lui dire qu’il était le cadet de la reine d’Angleterre que la réponse aurait été la même.

- Hum, hum...

Elle l’ignorait, elle essayait de trouver un moyen de partir de cet endroit. Ce qui la fit sortir de ses pensées fut le bruit de l’étui sur le sol. Le son légèrement étouffé fit se retourner plusieurs personnes qui finirent rapidement par considéré que leur sort leur importait plus. L’attitude du mioche avait soudain complètement changé. Un autre numéro de comédien ? Peut-être bien. Soudain il se mit à crier, hurler quelque chose à l’adresse de quelqu’un qu’il semblait seul à entendre. Non seulement il était agaçant mais en plus il était bruyant et attirait l'attention pour rien.

Il leva les yeux vers Sasha, surement juste à temps pour pouvoir encaisser la gifle bien sentie qu’elle lui assena. La main claqua dans un bruit sec sur la joue, elle n’avait même pas retenue son coup, quel en aurait été l’intérêt ? Une femme non loin de là esquissa un pas vers l’enfant et une autre personne sembla s’approcher pour attraper le bras de Sasha. C’est fou ce que les gens paniqué étaient stupides au point de s’occuper l’esprit avec n’importe quoi d’autre que le problème dans lequel il se trouvait. Dans leur petites têtes vides, ils avait surement supposer que la personne qui avait crier était elle. Les gens stupides et appeurés avaient toujours tendance à arranger les evenements comme ça les arrangaient.
Lorsque l’homme lui saisit le poignet, surement pour l’empêcher de frapper à nouveau le gamin, elle lui lança un regard si peu engageant, qu’il n’insista même pas quand elle se dégagea d’un geste sec, lui ordonnant en japonais de ne plus jamais reposer la main sur elle. Le japonais restait la langue qu’elle parlait assez fréquemment, de manière quasi-quotidienne d’ailleurs, et plus souvent pour les menaces. Il n’y avait rien d’étonnant a ce qu’elle utilise ce dialecte soudainement.

Elle posa son regard son l’enfant et la femme qui s’était mis à sa hauteur en lui dispensant de gentille parole compatissante et rassurante. Encore une mère en manque de son fils. Ce que les gens pouvaient être crédules. Ce cocon maternelle que semblait vouloir lui faire la femme qui avait rejoins le garçon n’empêcha pas Sasha de faire un pas vers ce dernier. Sur un ton froid et bas, elle lança, presque aussi soudainement qu’elle l’avait giflé.

- Ca va t’es calmé maintenant ?

Elle se baissa pour ramasser l’étui du violon. Lui rendre ? Et puis quoi encore. Elle mit simplement l’anse sur son épaule avec le dessin d’un léger sourire sur le coin de ses lèvres. Il avait peut-être tout ces badauds pour le protéger mais elle avait cru remarquer ce simple détail, le violon était une chose dont il avait pris soin de ne pas lâcher depuis le début de leur entretient. Elle avait un otage de choix, qui aurait pu lui servir si elle avait su jouer. Mais les cordes d’un violon étaient des armes on ne peut plus efficaces pour qui savaient s’en servir.

* Petit con va... Tu vas crever... *

Il venait de se prendre une belle gifle dans la gueule et il ne tituba même pas. Il se la prit en silence. Il ne fit pas un pas, rien... Son sourire traduisait pour lui. Elle l'avait frappé, juste ce qu'il voulait... Une femme, enfin elle ressemblait à une femme, s'approcha de lui et lui baragouina quelques phrases censé le rassurer. Son rictus se transforma en des pleurs enfantins. Il était fier de lui le gamin... Il se laissa tomber dans ses bras et feignit de pleurer alors qu'aucune larme ne coulait sur ses joues. Il vit la jeune femme s'approcher de lui et d'un ton presque crachant lui lança :

- Ca va t'es calmé maintenant ?

Il leva les yeux vers elle. Il s'apprêtait à répliquer quand il vit qu'elle se baissa et qu'elle ramassa quelque chose de...gris. Il se redressa, chercha à terre. Il n'avait pas son violon...

* Putain, tu vois comme tu peux être con... Con et chétif... *

Il poussa violemment la femme et essuya ses "fausses" larmes. La femme tomba à la renverse sur le béton froid abasourdie. Il n'en avait rien à foutre de cette conne qui voulait lui rendre service. Il se dressa devant la jeune femme. Il voyait bien qu'elle était bien plus grande que lui, il s'en foutait.

* Tu comptes faire quoi ? Tu es déjà mort... *

Il émit un grognement, simplement pour se calmer. La jeune fille le prendrait sans doute pour elle. Elle savait parfaitement ce qu'elle faisait. Et lui il était bien con de ne pas s'être douté que son violon aurait pu l'intéresser pour une quelconque prise en otage.

Il leva la tête vers elle et lui dit d'une voix qui cette fois, était sa vraie voix. Froide, pas du tout enfantine :

« Tu comptes nous montrer tes talents de violoniste ? »

Il savait qu'il la provoquait. Il savait qu'il n'avait pas l'avantage, mais il n'en avait que faire. Tout ce qu'il voulait c'était son violon et rien d'autre. Quitte à lui marcher dessus il s'en foutait...

* Et maintenant ? Tu récupères ton violon des mains de cette connasse... Tout de suite *

Ses lèvres se tordirent en un sourire mêlant rage et sadisme. Il n'allait pas tenir bien longtemps. Ses jointures étaient devenues blanches tellement il serait les poings. Il allait craquer bien vite à se rythme... Il ne supporterait pas la pression... Il ne pouvait la menacer, qu'est-ce qu'il lui ferait ? Il jeta un regard vide vers l'homme qui s'était éloigné sans vraiment le voir. Puis vers la femme qu'il avait jeté d'une force quelque peu extraordinaire pour un gamin de son âge. Ces deux cons n'allaient pas beaucoup l'aider...

* T'es con ou tu le fais exprès ? Arrache-lui les yeux et démerde toi pour lui reprendre ce putain de violon... *

Il se mordit les lèvres. S'il continuait à parler tout seul il allait devenir barge, pour ce qu'il l'était déjà...

« Tu comptes en faire quoi ? M'étrangler avec les cordes ou me tabasser avec ? Ou quelque chose de plus original peut-être... »

C'était sorti sans vraiment qu'il s'en rende compte. C'était toute son attitude qui avait changé. Jusqu'à son regard émeraude. Il était devenu plus sauvage, presque sanguinaire... Il n'avait rien du gamin qui s'appelait Christopher... Il était tout sauf celui-ci. Il repensa à sa soeur, cette godiche qu'il s'était coltiner... Il espérait vraiment qu'elle soit morte. Pourquoi ? Parce que cette fille lui rappelait étrangement sa soeur. Il la revoyait, ou plutôt l'entendait, balancer son violon sur le sol... La lueur sauvage dans ses yeux disparus aussitôt qu'elle était venue...

« Arrête... »

Sa voix était redevenue celle d'un gamin apeuré... Et ce n'était pas feint. Il avait complètement perdu le contrôle de lui-même. Une minute de plus et il se serait vraiment jeté sur elle... Il s'effrayait lui-même...

Passer pour un bourreau d’enfant était vraiment le dernier de ses soucis. Une chance parce que les regards accusateur étaient tous rivés sur elle. Tant mieux, elle n’avait pas l’intention de s’en faire des amis de ces personnes là. Elle n’avait pas la moindre intention de se lier à quiconque ici. Elle garda l’instrument sur son épaule. La réaction n’avait pas fait un pli. Il fallait frapper bas pour faire apparaître les choses sous leur véritable aspect. Ce qu’elle avait devant elle, une part d’elle aurait préféré ne pas la découvrir. Ainsi, c’était une personne aussi mauvais et au regard aussi dur qui se cachait derrière ses trait enfantins.

Les mots filaient aussi rapidement que le visage se décomposaient de stupeurs autour d’eux. La femme au sol semblait figée sous la surprise, dans une position grotesque. Sasha avait presque envie de rire à voir tout ces abrutis tombé de leur idéaux. Mais elle devait plutôt faire attention à ce qu’elle avait devant elle. A peu de chose prêt, on aurait pu comparer cela à une bête assoiffée de violence prisonnière dans le corps d’un enfant. C’était quelque chose auquel Sasha faisait face pour la première fois, il fallait bien l’avouer. Mais loin d’elle l’idée d’en avoir peur. Il n’y a que l’idiot qui craint ce qu’il ne connait pas.

Elle passa outre la remarque sur une quelconque démonstration de sa part. Elle n’y répondit même pas. Elle le fixait. Qu’il soit voyant, mal voyant ou non voyant, cela n’avait plus la moindre importance maintenant. Celui qui provoquait avait été provoqué. Les rôles venaient de s’inverser. Sasha était alors en position de force.
Elle le laissa, sans la moindre réaction a son encontre, ni même le moindre mot. Elle se contentait de poser sur lui un regard calme et froid. Elle ne baissait les yeux que pour pouvoir ne pas lâcher son regard, ce regard qui avait tant muée jusqu’à maintenant pour sembler rester dans un fond de haine à son encontre.

*- C’est très bien ça... Haïs moi. -*

Le but de la manœuvre était simple. Elle se supportait les petits jeux, surtout quand elle était en position de victime. Elle avait réussi à prendre le joueur à son jeu. De là à dire que le violon avait été sa cible depuis le début serait un mensonge. Mais elle avait bien l’intention de le provoquer jusqu’à le découvrir.
Et elle avait réussi au point de détester ce qu’elle voyait. Un brillant succès qui lui brulait les yeux. Alors que de son coté, elle était calme et silencieuse, lui au contraire semblant voir sa colère croître au fil des secondes. Elle finit par baisser à nouveau les lunettes sur son nez. Empêcher l’enfant de pouvoir la fixer tout en pouvant le faire de son coté.

« Tu comptes en faire quoi ? M'étrangler avec les cordes ou me tabasser avec ? Ou quelque chose de plus original peut-être... »

Elle laissa filer quelques secondes après cette remarque avant d’éclater de rire. Le rire n’était pas moqueur, il n’était pas vraiment gentil non plus. Il eu pour effet de faire reculer quelques personnes qui se dirent surement qu’ils étaient l’un comme l’autre complètement fou. Entendre de tels paroles dans la bouche d’un môme de 10 ans, elle les avait entendu, presque traits pour traits dans la bouche d’une personne bien plus âgé. C’était risible de voir ce petit corps se mouvoir et articuler quelques paroles d’un policier véreux de Shinjuku.
Elle ajusta l’instrument sur son épaule et se calma son éclat de rire en posant son regard sur le gamin à travers les verres teintés de ses lunettes. Elle avait fouillé sa mémoire pour trouver quelques mots d’allemand. Ca n’avait pas été facile mais elle avait construit deux phrases assez brèves pour qu’elle soit au moins sur que le sens serait clair.

- Aucun intérêt de te tuer pour le moment. Si tu le veux, suis-moi.

Sur ses simples mots, elle se dirigea un peu plus loin, pas vraiment dans un but précis, il fallait qu’elle s’éloigne de ce troupeau de badaud, et ce mioche devenait soudain plus intéressant qu’il n’avait pu le sembler. Et puis, même si elle détestait les enfants, elle avait entendu la petite plainte, la voix tremblante de ce gosse après sa remarque qu’il l’avait tant fait rire.
Elle pourrait surement l’utiliser. Ils avaient un point commun. Ils se détestaient mutuellement. Il n’y avait pas mieux pour s’entendre dans un conflit d’intérêt...

» Parceque faut bien que je commence.